ZestVlog

La Confrence nationale des territoires se tiendra sans les principales associations d'lus locaux


L'Association des maires de France (AMF), l'Assemblée des départements de France (ADF) et Régions de France ont décidé de quitter la Conférence nationale des territoires (CNT), ont annoncé ce 3 juillet leurs trois présidents de droite ou du centre, au cours d'une conférence de presse commune au siège parisien des présidents de département. Conséquence : les trois associations n'auront aucun représentant lors de la réunion de l'instance nationale de dialogue qui se réunit ce 4 juillet. Le rendez-vous qui doit se tenir dans la matinée à Matignon doit aborder pas moins de six sujets et non des moindres : l'eau et l'assainissement, la réforme de la fonction publique territoriale, le projet de loi d’orientation des mobilités, le bilan de la contractualisation financière entre les grandes collectivités territoriales et l'État, la refonte de la fiscalité locale, ainsi que l'organisation de la réunion de la CNT du 12 juillet consacrée à l'Europe et à la cohésion des territoires. Les trois associations boycotteront aussi la semaine prochaine la séance de la CNT. Pour sa part, l'ADF affirme avoir, au-delà de ces deux rendez-vous, "gelé" tous ses "contacts avec les ministères".
"Ce qui a fait déborder le vase, a expliqué le président de l'association, Dominique Bussereau, c'est la manière dont nous avons négocié sur les mineurs non accompagnés et le financement des allocations individuelles de solidarité." "On ne peut pas à la fois nous taper dessus et nous demander de collaborer au quotidien", a-t-il estimé. Il n'y a "pas de management politique des collectivités territoriales" au sein du gouvernement, a diagnostiqué l'ancien ministre de Jean-Pierre Raffarin.

"Recentralisation de toutes les politiques"

"Les maires de France sont solidaires des départements", a déclaré François Baroin, le patron de l'AMF. "Je n'irai plus autour de la table pour entendre dans le meilleur des cas des sermons, et dans le pire des cas un dédain prétentieux qui donne le sentiment que, quand on avance quelque chose, c'est le monde d'avant", a-t-il poursuivi. "Le gouvernement a créé toutes les conditions pour se mettre lui-même dans une impasse de dialogue. Depuis un an, sur tous les sujets, les décisions sont unilatérales", a-t-il fustigé, reprenant plusieurs des arguments avancés par les trois présidents dans une tribune commune publiée ce 3 juillet dans le Figaro. Jugeant que le "niveau de tensions" entre l'exécutif et les élus locaux "est spectaculaire", le maire de Troyes a dénoncé "le déménagement du territoire" et "la recentralisation accélérée" qui seraient menés actuellement avec une ampleur "jamais vue". Selon lui, le pouvoir aurait une "conception d'un État tout puissant" qui est celle des "années 1960 et 1970". On pense que "pour régler le problème du chômage, il faut appeler le préfet de département", a-t-il regretté.
Le président de Régions de France, Hervé Morin, a enfoncé le clou. L'exécutif fait preuve d'"un simulacre de dialogue", a-t-il dénoncé. En jugeant que "le bonapartisme a trouvé un nouveau visage en France". L'élu centriste a aussi souligné les contradictions d'un pouvoir central qui déclare "vouloir jouer la différenciation des territoires", mais qui par ailleurs prend des décisions conduisant à "une recentralisation de toutes les politiques" et ne donne pas de suite aux demandes de certains présidents de régions de porter de nouvelles responsabilités dans le cadre d'expérimentations.

"Des lettres de cachet envoyées par le monarque"

Les contrats de maîtrise des dépenses de fonctionnement que l'État vient de conclure pour trois ans avec 229 grandes collectivités territoriales et intercommunalités (voir ci-dessous notre article de ce jour sur les collectivités signataires) sont l'une des manifestations parmi d'autres de la "recentralisation en marche", selon les présidents d'associations d'élus locaux. Les collectivités "n'ont pas d'autre choix" que de signer ces "contrats léonins", a déploré François Baroin. "C'est le directeur du Budget, peut-être même une sous-direction du Budget, qui a rédigé ce texte", mais "avec aucun filtre politique", a-t-il dit en déplorant que Matignon n'ait "pas fait son travail".
Ces contrats s'apparentent à "des lettres de cachet envoyées par le monarque aux collectivités", a lancé Gaël Perdriau, maire de Saint-Étienne et président de Saint-Étienne métropole, à qui la parole a été longuement donnée. En plus de priver de liberté les élus locaux, cette politique va "avoir des conséquences terribles pour l'économie française", s'est inquiété celui qui a lancé, le 18 juin dernier, "un appel aux élus" des 322 grandes collectivités désignées par la loi et aux "36.000 maires de France". Les plus petites collectivités situées dans les territoires concernés par la contractualisation risquent de voir les aides à leurs projets se réduire, a-t-il pointé. Se définissant comme le "sans-culotte de la République", l'élu local envisage de saisir la justice européenne.

Garantir l'autonomie fiscale locale

Pour que les élus locaux reprennent le chemin du dialogue, le gouvernement "devra mettre quelque chose sur la table", a estimé Dominique Bussereau. Les patrons des trois principales associations d'élus locaux ont souhaité l'adoption au Parlement des amendements des députés Christophe de Jerretie et Charles de Courson visant à garantir dans la Constitution l'existence d'une véritable autonomie fiscale locale. Ils ont aussi appelé au respect par l'État de ses engagements financiers dans les actuels contrats de plan État-régions, en particulier sur le volet des transports, dont l'exécution à ce jour ne s'élève qu'à "20% en moyenne". Dominique Bussereau a plaidé aussi une énième fois pour qu'une solution soit trouvée pour le financement des allocations individuelles de solidarité. Enfin, il a souhaité que l'exécutif favorise l'adoption de la proposition de loi visant à adapter la loi Notr d'août 2015, que la majorité au Sénat a récemment adoptée en première lecture. De son côté, François Baroin a souhaité que l'État finance certaines priorités en matière d'investissements locaux. Alors que les collectivités s'engagent dans la maîtrise de leurs dépenses de fonctionnement, ce serait du "donnant-donnant", a-t-il dit.
Quelques heures après la conférence de presse des présidents des trois associations d'élus locaux, le président du Comité des finances locales (CFL), André Laignel, a lui aussi annoncé devant la presse qu'il ne participera pas à la réunion de l'instance nationale de dialogue de la CNT à Matignon. L'Association des maires Ville & Banlieue de France ne prendra pas part non plus aux travaux préparatoires de la CNT, ni à la réunion de la CNT elle-même, a-t-elle indiqué dans un communiqué.

Boycott ou pas : le bloc communal divisé

En revanche, le président du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale (CSFPT), Philippe Laurent, sera présent à ce rendez-vous, dont l'ordre du jour porte notamment sur les évolutions de la fonction publique territoriale. Les représentants de Villes de France, de France urbaine, de l'Assemblée des communautés de France (ADCF), de même que ceux de l'Association des petites villes de France (APVF), ainsi que les maires ruraux devraient en revanche siéger à la réunion.
On aurait pu s'attendre à ce que les divergences entre l'AMF et l'ADF au sujet de la réforme fiscale – l'une prônant clairement le transfert au bloc communal de la taxe foncière des départements, l'autre rejetant complètement cette piste – mettent à mal l'alliance entre les deux associations (voir encadré ci-dessous). Il n'en est finalement rien, même si le front uni des associations du bloc communal était resté en sommeil au cours des derniers mois, mise à part une première conférence de presse commune en avril dernier. "Il n'y a plus eu de rencontre de nos responsables depuis novembre", déplore le numéro deux de l'une association d'élus locaux. En estimant que "c'est un manque".
"La politique de la chaise vide n'est jamais féconde", a réagi Matignon après la conférence de presse des associations d'élus locaux. L'entourage du Premier ministre a confirmé le maintien des réunions de ce mercredi et du 12 juillet. "Les postures ne nous détournent pas de la méthode que nous tenons", a-t-il précisé.

Le gouvernement resterait sur l'idée d'un transfert de foncier bâti
Le gouvernement envisagerait d'affecter aux communes les parts départementale et intercommunale de la taxe foncière pour compenser la fin de la taxe d'habitation après 2020, selon les informations obtenues par Les Echos et par l'AFP auprès d'une source gouvernementale. Il devrait faire état de son projet ce mercredi 4 juillet lors de la réunion de l'instance nationale de dialogue de la CNT… en l'absence, donc, des principaux intéressés.
"Si on prend la totalité de la taxe foncière aux départements et qu'on la donne aux communes, on compense pratiquement la totalité" de la suppression de la taxe d'habitation, soit environ 14 milliards, a indiqué cette source. Le porte-parole du gouvernement, Benjamin Griveaux, a semble-t-il confirmé cette piste mardi matin sur BFMTV et RMC, considérant qu'elle faisait "le plus grand sens" : le fait que "l'impôt payé au plus près aille à la collectivité la plus proche" est d'une "logique assez implacable", "qui donne surtout de la lisibilité, de la simplicité à ce mille-feuille fiscal local", a-t-il déclaré.
Autrement dit, le gouvernement serait sur le point de reprendre à son compte une proposition proche de celle initialement émise par le Comité des finances locales puis par le rapport d'Alain Richard et Dominique Bur. La précédente réunion de l'instance de dialogue, le 17 mai dernier, entendait précisément ouvrir la concertation avec les élus locaux sur les scénarios tracés par la mission Richard-Bur. Sauf que depuis ce rapport, Alain Richard aurait lui-même reconnu que le transfert de la part départementale aux communes serait extrêmement complexe à mettre en œuvre… et le CFL a clairement changé de braquet, ayant finalement opté pour un maintien du dégrèvement.
Le CFL a en tout cas approuvé ce 3 juillet "à l'unanimité des suffrages exprimés des membres élus" une délibération sur la compensation aux communes et intercommunalités de la suppression intégrale de la taxe d'habitation. Dans l'attente d'une "indispensable" réforme, l'instance demande que l'État assure la "compensation intégrale des ressources supprimées" via la poursuite du dégrèvement de taxe d'habitation mis en place à partir de cette année. Les représentants des trois catégories de collectivités et des intercommunalités mettent aussi en avant le souhait que les départements conservent le produit des droits de mutation à titre onéreux (DMTO), alors que la commission Richard-Bur proposait en mai de transférer ce produit à l'État.
Le gouvernement envisagerait de compenser les départements en leur affectant un impôt national. "On reviendrait sur une réaffectation d'un impôt national, du type IRPP (impôt sur le revenu), qui est plus facilement redistribuable à 100 départements qu'à 36.000 communes", a indiqué la source gouvernementale à l'AFP. Pour l'intercommunalité, selon Les Échos, Bercy pencherait pour une part de TVA.
Interrogé sur ces "fuites" mardi matin lors de la conférence de presse, François Baroin a simplement regretté de devoir "apprendre par la presse que du jour au lendemain il a été donné raison à quelques propositions" tandis que Dominique Bussereau estime qu'il s'agit "peut-être" d'"essayer de nous diviser".
C.M. et T.B.

ncG1vNJzZmivp6x7o63NqqyenJWowaa%2B0aKrqKGimsBvstFoo5plk6S7p7HRnqWcnV2jrrW1zqeYpZ1dmbK0edOeqauhpKS2s7HSZqqeZaSesq%2Bw0ZpkrJmeqHqtsdJmp6uhnpi2sa3LnqpmmaOovKS1wK2gqKajYrGmuNSsZKWnk5bCuQ%3D%3D

Martina Birk

Update: 2024-08-29