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un bilan parlementaire trs mitig


La loi du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance divise. Un rapport parlementaire sur d'évaluation présenté à l'Assemblée nationale le 7 juin 2023 met à jour ce clivage. Géraldine Bannier (Modem, Mayenne) et Jérôme Legavre (LFI, Seine-Saint-Denis), les deux rapporteurs, ont chacun rédigé leur propre introduction aux accents divergents et plusieurs recommandations ne sont pas partagées. Un clivage qui touche particulièrement les sujets intéressant de près les collectivités.

Le premier sujet d'importance de la loi était l'abaissement de l'âge de début de l'obligation d'instruction de six à trois ans, motivé par "le rôle décisif de l'enseignement préélémentaire dans la réduction des inégalités dès le plus jeune âge". Ici, les rapporteurs concluent à "une absence d'effets sur le taux de scolarisation des jeunes enfants" : pour la tranche d'âge de trois à cinq ans, ce taux atteignait déjà 98,9% avant l'entrée en vigueur de la loi.

Prise en charge des maternelles privées

Mais cette nouvelle règle n'a pas été sans conséquences pour les communes. La plus importante a été l'obligation pour les communes de verser une contribution forfaitaire pour chaque élève soumis à l'obligation d'instruction scolarisé dans une école maternelle privée sous contrat. Pour les rapporteurs, les coûts de cette compensation financière sont "difficiles à évaluer", les estimations allant de 150 à 40 millions d'euros selon les sources. Et alors qu'une ligne budgétaire au profit des communes était consacrée par l'État à la compensation de l'incidence financière de la mesure, les rapporteurs observent sur les trois derniers exercices budgétaires une "sous-exécution des crédits prévus par les lois de finances successives". Parmi les explications, le rapport souligne que "certaines communes ont pu renoncer à demander cette compensation au regard de la complexité des critères d'éligibilité" et que "dans les communes contraintes d'instaurer une contribution au profit des écoles maternelles privées, la baisse des effectifs d'élèves du premier degré a pu compenser une partie du coût de la mesure, diminuant le montant de la compensation à laquelle elles pouvaient prétendre".

Pour le rapporteur Jérôme Legavre, l'abaissement de l'âge de début de l'obligation d'instruction a in fine constitué un "cadeau à l'enseignement privé". Le député de Seine-Saint-Denis demandant au passage d'appliquer le principe selon lequel "les financements publics doivent bénéficier au seul enseignement public".

Obligation de formation

Le modèle des jardins d'enfants, qui ne possèdent pas le statut d'école, a par ailleurs été remis en cause par l'abaissement de l'âge de début de l'obligation d'instruction. Si Géraldine Bannier recommande de prolonger la période transitoire prévue par la loi pour permettre la transformation des jardins d'enfants en école maternelle, Jérôme Legavre, lui, souhaite "permettre aux jardins d'enfants gérés ou financés et conventionnés par des collectivités publiques de poursuivre leur activité en pérennisant" la dérogation appelée à expirer à la fin de l'année scolaire 2023-2024.

La loi du 26 juillet 2019 mettait également en place une obligation de formation pour tous les jeunes âgés de seize à dix-huit ans afin de lutter, notamment, contre le décrochage scolaire. Dans ce cadre, la mission locale doit transmettre au président du conseil départemental le dossier du jeune décrocheur afin que celui-ci soit pris en charge. Or cette transmission du dossier individuel du jeune ne s'accompagne "que rarement d'un retour vers les missions locales sur les modalités de prise en charge par le département", constatent les rapporteurs. Ils recommandent de donner instruction aux préfets de sensibiliser les exécutifs départementaux à la nécessité d'établir un dialogue continu avec les missions locales afin d'établir un suivi complet de chaque dossier individuel.

Des EPLEI trop élitistes

Une des nouveautés de la loi était la création d'établissements publics locaux d'enseignement international (EPLEI). Ces établissements d'excellence dérogeant au droit commun et tournés vers l'enseignement des langues vivantes devaient notamment "donner la possibilité aux collectivités territoriales de développer l'attractivité économique de leur territoire en y renforçant l'offre d'enseignement international". Ici, le rapport constate que ce nouveau cadre juridique a été "peu mis en œuvre par les collectivités territoriales". Seuls quatre établissements publics ont en effet acquis le statut d'EPLEI, et si "plusieurs académies et collectivités territoriales portent des projets", ceux-ci sont encore très peu nombreux.

Mais ce n'est pas la tiédeur des collectivités à s'engager dans les EPLEI qui est pointée par les rapporteurs. Géraldine Bannier exprime sur le sujet "une préférence pour les solutions qui privilégient la mixité entre EPLE et EPLEI ou l'intégration de sections binationales et internationales au sein d'EPLE". Pour la députée de la Mayenne, "la proximité de sections élitistes [peut] être bénéfique pour tous". Au contraire, Jérôme Legavre se prononce pour "la suppression des EPLEI qui sélectionnent les élèves" et contre une "politique de l'offre" qui "exacerbe la concurrence entre les établissements et renforce la ségrégation scolaire". En l'occurrence, dans chacun des quatre EPLEI actuels, l'indice de position sociale (IPS) "apparaît considérablement plus élevé que la moyenne départementale ou académique, signe d'une mixité sociale très faible". Le député de la Seine-Saint-Denis propose à la place la création d'options binationales et internationales dans tous les établissements.

Limiter ou supprimer les Pial

Le dernier sujet d'importance de la loi du 26 juillet 2019 pour les collectivités avait trait à l'école inclusive, et en particulier aux AESH (Assistant d'élèves en situation de handicap) et aux Pial (Pôles inclusifs d'accompagnement localisés), créés dans chaque département pour répartir et coordonner les AESH dans un territoire déterminé. Et ceci dans un contexte d'augmentation rapide du nombre d'élèves en situation de handicap scolarisés en milieu ordinaire.

La loi a prévu le recrutement des AESH par CDD de trois ans, renouvelable une fois, tout en maintenant la possibilité d'accès au CDI après six années d'exercice, ainsi qu'un référentiel national pour leur formation professionnelle. Mais la précarité que la loi entendait combattre demeure : la rémunération moyenne des AESH n'est que de 850 euros par mois, pointe le rapport. Et ici encore, les avis divergent sur les solutions. Quand Géraldine Bannier prône la généralisation du recrutement conjoint d'AESH par l'Éducation nationale et les collectivités territoriales pour renforcer la continuité de la prise en charge des élèves et permettre une meilleure répartition et une augmentation du temps de travail hebdomadaire des personnels, Jérôme Legavre souhaite conférer aux AESH le statut de fonctionnaire au sein d'un nouveau corps de catégorie B de la fonction publique d'État.

Enfin, les Pial, qui étaient au nombre de 4.000 à la rentrée 2021 et sont chargés d'arrêter l'emploi du temps des AESH et de les répartir entre les établissements, ils ont, selon Jérôme Legavre, "avant tout conduit à une dégradation des conditions de travail des AESH en raison de la répartition de leur temps de travail entre plusieurs établissements et des conséquences de cette organisation". Et le député de la Seine-Saint-Denis de demander leur suppression, tandis que Géraldine Bannier envisage plus simplement de "limiter l'étendue du ressort territorial des Pial et le nombre d'établissements dans lequel un même AESH est amené à intervenir".

En conclusion, si pour Géraldine Bannier la loi du 26 juillet 2019, "qui n'a que quatre ans d'existence, ne peut bien sûr suffire à elle seule à rétablir un climat de confiance à l'école", Jérôme Legavre est, on l'aura compris, bien plus tranchant : pour lui, "iI est urgent […] de revenir" sur ses dispositions.

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Martina Birk

Update: 2024-08-30